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contenaient le fruit de tant de peines et de travaux, insistait pour que la remise en fût faite entre ses mains. Les membres de la commission, intimidés par cet ordre et par les événemens, ne voyant d’ailleurs aucun moyen de résistance à la force, allaient peut-être céder, quand l’impétueux Geoffroy, trouvant dans son cœur des éclats de noble indignation et des paroles à la hauteur de la circonstance, répliqua à l’Anglais : « Hamilton, vos baïonnettes n’entreront que dans deux jours dans la place ; dans deux jours, nous vous livrerons nos personnes ; mais, d’ici là, ce que vous demandez sera détruit. Notre sacrifice va si accomplir. Nous brûlerons nous-mêmes nos richesses. C’est de la célébrité que vous voulez ? Eh bien ! comptez sur les souvenirs de l’histoire ; vous aussi, vous aurez brûlé une bibliothèque dans Alexandrie ! » Les Anglais rougirent, et les matériaux destinés au grand ouvrage français sur l’Égypte furent sauvés.

M. Geoffroy revint à Paris, où il retrouva son camarade d’expédition, le jeune Bonaparte, qui commençait sa fortune et celle de la France : l’un avait recueilli en Orient les modestes conquêtes de la science sur la nature, l’autre était allé saisir cette redoutable épée qui devait bientôt ramasser à terre la couronne du monde. M. Geoffroy rapporta des manuscrits qui ont été imprimés dans un ouvrage durable, des échantillons précieux qui ont orné nos galeries, et des travaux qu’il a continués : si la gloire scientifique est moins brillante que la gloire militaire, ses œuvres sont peut-être en revanche plus solides : l’épée a été brisée ; l’empereur et l’empire ont dis-