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cet homme étaient perdues. Nul en France ne songeait plus à Lakanal, qui avait songé si ardemment à ses amis. Je me trompe ; le célèbre naturaliste Geoffroy Saint-Hilaire, qui n’avait cessé d’entretenir avec lui un commerce de lettres, réclama au nom du fondateur du Muséum pour qu’on lui rendit sa place à l’Institut. Cette nouvelle décida Lakanal à revenir en France : « Grâce à vos bons efforts, écrivait-il, je rentre dans mon pays par la porte de l’honneur. »

Le voyez-vous repassant les mers à l’âge de soixante-seize seize ans ! Il touche enfin ce sol natal qu’un événement politique avait renouvelé. Voici ce que nous lisons écrit de sa main au bas du procès-verbal de sa réintégration à l’Institut :

Nescio quâ natale solum dulcedine cunctos,
Ducit et immemores non sinit esse sui.

« Cette délicieuse et profonde émotion, je l’ai éprouvée en rentrant dans ma chère patrie, après vingt-deux ans, à deux mille lieues loin de France. »

Lakanal avait un instant songé à rentrer dans la vie politique. On fut étonné de la verdeur et de l’énergie de ce vieillard : à peine si quelques cheveux blancs se risquaient dans ses touffes noires ; sa taille était droite ; le caractère dantesque de sa tête est resté présent au souvenir de tous ceux qui l’ont connu. Par un sentiment naturel à un exilé, il voulut revoir la maison qu’il avait habitée autrefois. Tel était, comme