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gés, Lakanal trouva moyen de les vaincre. Sa place à la Convention fut constamment marquée par les services qu’il rendit au Muséum et par les actes pacifiques qu’il fit sanctionner au milieu de l’agitation des esprits. Ce n’est point à dessein que nous rapprochons sans cesse les scènes révolutionnaires, des scènes plus calmes de la nature. Ce rapprochement naît de lui-même à chaque pas dans les premières années qui établirent la fortune du nouveau Jardin des Plantes. L’illustre vieillard, surnommé par un club de sans-culottes le berger Daubenton, faisait une leçon sur les convenances et le mérite du style en histoire naturelle ; il lui arriva de citer une phrase qu’on retrouve, après Buffon, dans plus d’un auteur : Le lion est le roi des animaux. Le professeur, homme exact, blâmait les termes de cette proposition comme manquant de rectitude ; puis il ajouta : « Non, il n’y a pas de roi dans la nature ! » En France, une allusion est tout de suite saisie. À l’instant même la salle de se remplir d’applaudissemens qui durent près d’un quart d’heure. Daubenton, alarmé de son succès, ne savait à quoi attribuer ces élans d’admiration ; son visage, visiblement troublé, n’exprimait que l’embarras et l’étonnement. Il interroge alors le jeune aide-démonstrateur qui l’assistait dans son cours : « Pourquoi ce bruit ? qu’y a-t-il donc ? » Il se trouvait que ce naïf vieillard avait été éloquent sans le savoir et avait flatté les exaltations du moment quand il croyait n’avoir exprimé qu’une simple vérité d’histoire naturelle.

Nous rapporterons encore un exemple de ce que peut dans certaines circonstances données, cette éloquence