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se joindre par instans le doute et la défiance de lui-même. « Je m’étais trompé si souvent, avoue-t-il avec ingénuité : qui pouvait me répondre que je ne me trompais plus. » Qu’il soit, oui ou non, chimérique de marquer des divisions sur ce terrain foncièrement vierge du cerveau, où nul ne songeait alors à chercher des régions différentes pour les diverses facilités de l’âme, on n’en comprendra pas moins quel travail Gall a dû faire pour en arriver là. Il était servi dans ses recherches par de puissans instincts qui lui révélaient aisément les habitudes morales d’un être d’après l’ensemble de ses caractères extérieurs. Mais le tort de ces hommes à invention est précisément d’ériger en système ce qui n’est chez eux que la suite de facultés naturelles. Gall tomba comme les autres dans cette erreur. Dès le commencement il voulut donner ses observations pour bases à une nouvelle doctrine, et toujours ces bases arbitraires fléchissaient devant des faits imprévus. De là des hésitations, citations, des tâtonnemens sans fin : ses pas en avant n’étaient pour la plupart du temps que des pas en arrière ou à côté de la route ; il avançait, et retirait aussitôt le pied de ces terrains trompeurs ; il quittait la voie, y revenait de nouveau pour la quitter encore, et au milieu de toutes ces fluctuations morales, il se croyait comme ensorcelé par le génie de la nature dont il tentait les mystères. Ce ne fut qu’après avoir acquis une masse de faits au hasard, qu’il lui fut possible d’aller avec quelque certitude au-devant de faits nouveaux, et de les ranger dans un ordre toujours provisoire, que troublait souvent la moindre