Page:Esquiros - Les Hirondelles, 1834.djvu/24

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 18 —

sée, d’élargir tout système, de faire libre toute intelligence : où Racine donnerait une poignée de main à Shakespeare, où le candide La Fontaine irait souper chez le satanique Byron, où Molière et Dante, tous deux proscrits et froissés par les hommes, rêveraient sous le même toit une comédie à leur manière pour y distiller l’amertume de leur âme. Chacun remplirait ainsi la tâche que lui aurait imposée la Providence. On ne se battrait plus pour un mot, pour une pensée, pour une chimère ; il n’y aurait plus qu’une seule règle : la vérité ! qu’un seul roi : le beau !

Mais, dira-t-on, qui vous apprendra que vous avez saisi le point de transition entre le vrai et le faux, le beau et l’emphase, puisque vous rejetez tout code de littérature conventionnellement obligatoire ? C’est le goût ! Et qu’est-ce que le goût ? L’observation de la nature, la comparaison de ses sensations personnelles avec celles d’autrui, la fusion de l’homme dans la société et de la société dans l’homme. Quelque grand que vous soyez, il y aura toujours quelque chose au-dessus de vous : c’est l’humanité ! Les œuvres les plus vraies ne sont pas celles qui ont été faites par un homme, mais par un peuple : c’est la distance d’Ho-