— Grand merci, bon vieillard ! Parlons de votre fille ;
Quel âge, dites-moi, croyez-vous qu’elle aurait ?
— Dix-huit ans. — Elle aussi méconnaît sa famille ?
— Je le crois. — Et son nom ? — On l’appelait Camille :
Je le gravai dans la forêt.
— N’aviez-vous point sur elle attaché quelque signe ?
— De son cou blanchissant pendait une croix d’or.
Camille, sous ses doigts, prend la croix qu’il désigne ;
Le bon vieillard la touche ; et, dans sa joie insigne,
Baise long-temps ce doux trésor.
Lors sa fille s’élance en s’écriant : Mon père !
Le vieillard tendrement la presse dans ses bras ;
Dans ses yeux éteints tremble une larme prospère ;
Il dit : J’ai retrouvé le soleil que j’espère,
Ma fille guidera mes pas.
De nouveau dans ses yeux un faible regard brille,
Ses deux genoux, sous lui, faillissent en ployant ;
Puis il dit, bénissant son unique famiUe :
J’ai vécu cinquante ans pour retrouver ma fille,
Las ! et je meurs en la voyant !