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Un grand fauteuil roula ; sous un rideau de moire
Des convives pieux le cercle s’élargit ;
Le vin du bon vieillard réveille la mémoire,
Et joyeux il demande à conter son histoire
Près du grand chêne qui rougit.

— Le ciel me punit bien en m’ôtant la lumière ;
Mais je l’ai mérité. Dans ce monde, égaré,
Si je désire tant entr’ouvrir la paupière,
Ce serait pour revoir une fille première
Dont un crime m’a séparé ! —

La vierge répondit : Vous pleurez ; je vous aime !
Loin d’un père inconnu comme vous je gémis,
Et penser à lui seul est mon bonheur suprême !
Mais pour vous consoler, dans ce veuvage extrême.
Vieillard, n’avez-vous point d’amis ?

— Pas encor. Mais le ciel, sous un toit charitable,
M’a conduit. Et ce soir je le prîrai pour vous,
Pour que vous retrouviez un père vénérable,
Pour que beau comme vous et comme vous aimable,
S’offre à vos yeux un jeune époux !