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Dieu avait irrévocablement prescrit pour l’éternité ? Cette apathie et cette indifférence , communes à la masse de la nation indoue, devaient durer tant que les étrangers n’essaieraient pas de toucher à l’ordre social,, de modifier ce qui ne pouvait être changé. Alors seulement, on verrait se réveiller le fantôme de la nationalité indoue, sortant de sa léthargie, pour défendre , non pas la patrie, non pas le pouvoir, non pas même la propriété du sol, mais le droit de vivre comme ont vécu les générations précédentes, avec les mêmes lois, les mêmes traditions, les mêmes coutumes, les mêmes pratiques pour chaque acte de la vie.

Le passage suivant d’un ouvrage publié par un natif, à l’occasion de la sanglante révolte des cipahis, en 1857, dépeint d’une manière frappante ce respect inviolable des Indous pour leurs usages et leurs institutions sociales, leur attachement aveugle au principe de la caste, fondement de ces institutions, et le péril qu’il y aurait à porter sur cette arche sainte une main sacrilège : « Qui de nous, dit-il, déteste la religion ? Le Shâstra a ordonné que chacun aimât et respectât la sienne. Vous pourrez, si vous le voulez, avoir un millier de missionnaires entretenus aux frais du Gouverneraient pour prêcher, un millier pour tenir des écoles et distribuer des bibles au nom du Gouverneur général : le peuple n’en murmurera pas : peut-être rira-t-il un peu, mais ce sera tout. Il n’est qu’une chose à laquelle vous devez faire attention, c’est de ne pas toucher aux castes. N’obligez jamais un Indou à manger les aliments qu’un autre aura fait cuire, ou à déchirer avec des lèvres la cartouche graissée par un Européen. Cette distinction qui existe entre les castes disparaîtra peut-être un jour, avec beaucoup d’autres usages nés de l’ignorance et de la superstition ; mais le temps n’est pas encore venu. Tenter de les