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vité productive s’arrête à la limite des exigences du besoin individuel. Le travail pour elle n’est plus une fonction sociale ; il n’est qu’une marchandise dont il s’agit de vendre le moins possible le plus cher possible. La direction d’une industrie n’a plus de son côté aucune liaison avec un intérêt supérieur national ou humain ; c’est une entreprise d’achat de travail ; elle n’a pour but que d’en obtenir le plus possible au plus bas prix possible. Le travailleur dit au capitaliste (ce sont les termes mêmes de Marx) : « Je demande une journée de travail de durée normale ; je le demande sans faire appel à ton cœur, car dans les affaires il n’y a pas de place pour le sentiment… La chose que tu représentes vis-à-vis de moi n’a rien dans la poitrine[1]. » Le capitaliste ne manque pas de répondre « En tant que capitaliste, je ne suis que capital personnifié ; mon âme et l’âme du capital ne font qu’un[2]. Soit ; mais toi, en tant que travailleur, tu n’es qu’un instrument de bénéfice ; la chose que tu représentes vis-à-vis de moi n’a rien dans la poitrine. » Deux choses sans âme, deux choses qui n’ont rien dans la poitrine, voilà la société ! Ne parlez pas à Marx des intérêts de la nation « la richesse nationale, c’est l’enrichissement du capitaliste[3]. » Au fond de cette richesse soi-disant nationale, il y a quoi ? La dette publique ![4] Et qu’on ne dise pas que la suppression du régime capitaliste changera les rapports des hommes entre eux. Mis en possession des instruments du travail par la révolution, le travailleur comme individu ne cessera pas d’être la fin de tout le mouvement économique. « Le plaisir, dit le traducteur autorisé de Marx, le plaisir, but de tout organisme vivant,

  1. Le Capital, trad. française, p. 101.
  2. Id., p. 100.
  3. Id., pp. 317, 343.
  4. Id., pp. 347, 339.