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naires de ce temps, de savoir comment se ferait le passage entre l’ordre ancien, supposé renversé par l’insurrection, et l’ordre nouveau. Amar proposait, comme il l’avait déjà fait dans le premier comité, le rappel de la Convention, parce que, disait-il, la Convention restait le seul pouvoir légal. Mais on objectait que la Convention avait fait Thermidor, qu’elle avait proscrit les démocrates sous le nom d’anarchistes, de buveurs de sang, de terroristes, bref qu’à la fin elle était devenue passablement réactionnaire. « Le directoire secret jugea que des raisons d’un aussi grand poids devaient l’emporter sur l’avantage assez douteux d’une apparente légitimité. » Il faudrait donc établir un gouvernement provisoire. Serait-ce une dictature ? Debon et Darthé l’eussent voulu. « A l’appui de leur opinion, ils invoquaient l’exemple des peuples anciens » et les divisions du Comité de salut public. Les membres du directoire secret n’élevèrent contre cette proposition que des raisons d’opportunité, « par dessus tout, le préjugé général qu’il leur paraissait impossible de vaincre. » Ils se décidèrent en faveur d’une assemblée composée d’un démocrate par département, que le peuple de Paris en insurrection choisirait sur la proposition du directoire secret ; mais ce même directoire, après avoir fait des recherches scrupuleuses sur les démocrates à proposer (la liste était déjà dressée lors de l’arrestation de Babeuf), « ne cesserait pas ses travaux » une fois la révolution faite, « et veillerait sur la conduite de la nouvelle assemblée. » En d’autres termes il garderait le pouvoir. C’est donc la dictature collective qu’on se proposait en fin de compte d’installer. On justifiait la nomination de ce directoire et de l’Assemblée nationale par le peuple insurgé, de la façon suivante : « Il est impossible que tous les citoyens d’une vaste république se rendent, » pour détruire la tyrannie, « auprès de