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pensable dès l’abord pour rendre le courage à leurs partisans, et raviver autour d’eux l’ardeur révolutionnaire.

Le premier instrument de propagande créé à cet effet fut la société qu’on appela du Panthéon. Elle groupa un nombre considérable d’adhérents. Mais la loi lui interdisait l’organisation définie qui constitue les associations permanentes, et elle resta ouverte en quelque sorte aux premiers venus. Non seulement les agents du pouvoir que toutes les sociétés irrégulières savent reconnaître, mais, ce qui était plus grave aux yeux des organisateurs, les libéraux favorables au gouvernement et les patriotes tièdes se confondirent dans le réfectoire des Génovéfains avec les partisans de l’égalité de fait et de la révolution sociale. Ce mélange restreignait singulièrement la portée du nouveau groupe : les Panthéonistes effrayaient la population, ils servaient la politique conservatrice par l’épouvante qu’ils inspiraient et, en même temps, autorisés par le pouvoir, entravés par leur succès même auprès des républicains modérés, ils ne pouvaient rien pour la destruction de la « tyrannie » directoriale. Même la société parut un instant entièrement détournée de son but, puisqu’elle vota une adresse au Directoire où la majorité protestait de son attachement à la Constitution de l’an III et refusa d’admettre les Montagnards proscrits à l’exception de Drouet. Cependant les Egaux parvinrent à lui faire faire plusieurs démarches conformes à la tradition de 1793 : elle sollicita, en exécution des lois de ventôse, la distribution effective du milliard de biens nationaux promis aux défenseurs, de la Patrie, et l’attribution aux patriotes malheureux des biens des ennemis de la Révolution. Ainsi, dit très justement Buonarroti, elle familiarisait l’opinion « avec le principe qui place entre les mains du souverain le droit de disposer des biens. » De plus elle témoigna son intérêt pour Babeuf en demandant la liberté