se solidarisent et les volontés avec elles. Les moi deviennent des nous. Dans tout individu collectif, les impulsions par lesquelles le groupe réagit sur le monde environnant, sont mises d’accord avec les informations reçues en commun et avec les conditions du milieu en vertu de la même loi et par la même préadaptation organique. C’est la condition de son existence. Cela suppose que d’un individu à l’autre ces impulsions s’accordent entre elles. C’est un fait trop peu remarqué que nos volontés empruntent dans l’immense majorité des cas une forme générale et reproduisent avec de faibles variantes un type commun. Chaque groupe de ces coutumes ou règles porte le nom d’Art ; pour les distinguer des beaux-arts il serait peut-être avantageux de les appeler Pratiques ou Techniques. On a le tort de croire que les règles sont d’un côté et les volontés de l’autre et que les premières ont quelque part un mode d’existence indépendant de leur application dans les secondes. Non. Les arts ne sont pas dans la collection Roret ou dans les traités d’économie politique, d’éducation, de politique ou de morale, ou dans les codes et les constitutions écrites, encore moins dans l’Empyrée où trônent les Archétypes de Platon ; ils sont dans les volontés auxquelles ils s’incorporent, qu’ils constituent, à vrai dire, puisqu’ils ne sont des règles qu’à la condition de produire des actes et que leur efficacité pratique fait seule leur réalité. Seulement ils n’ont pas la même vertu dans toutes les consciences et chaque volonté humaine est faite d’une multitude de ces règles qui s’y réalisent en proportions variées avec des intensités diverses, ce qui, l’invention mise à part, prête à chacune de nos volontés une physionomie propre selon le milieu où nous avons grandi et les fonctions sociales que nous exerçons. Dans leur ensemble elles sont à
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