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débat qui dure et se ranime périodiquement depuis que les sociétés sont sorties de la barbarie. Peut-être convientil en ce moment plus qu’en tout autre à la philosophie française de s’interroger sur les principes de l’action, car chez nous, si nous ne nous trompons, ces principes, fondements de la morale et du droit, ne sont plus l’objet d’un accord unanime et, ce qui est pis, nous ne nous apercevons pas assez que des dissentiments de plus en plus profonds se creusent entre nous sur ces matières importantes.


I


Voici quelles sont à nos yeux les données initiales de tout problème pratique.

Prenons pied d’abord sur le terrain des sciences de la vie : nous ne nous y attarderons pas. Des études biologiques déjà anciennes nous ont amené à constater que dans toute l’échelle zoologique une différenciation de plus en plus marquée se poursuit entre les nerfs efférents ou moteurs, et les nerfs afférents ou sensitifs. Et nous avons dû reconnaître en même temps que chez les êtres les plus éloignés de l’activité réfléchie, les réponses motrices se trouvent adaptées aux excitations sensorielles de telle sorte que l’individu et l’espèce subsistent et accomplissent sans raison les actes conformes aux exigences de la vie selon les conditions du milieu. L’adaptation préexiste donc à la pensée claire ; elle peut se faire sans analyse et sans raisonnement. Par conséquent lorsque la conscience s’affirme, ce n’est pas elle qui crée l’adaptation ; elle la