des Français de toutes les conditions qui depuis cent ans en ont profité ou souffert, au point de vue de la France dans son ensemble, au point de vue de l’Europe, au point de vue du monde civilisé tout entier (car tels sont les éléments du problème), comment ceux qui l’ont conduite au jour le jour, nécessairement enfoncés dans la préoccupation de leurs intérêts personnels ou des intérêts de leur parti, auraient-ils pu réaliser cette ubiquité de point de vue et se faire une conscience pour ainsi dire adéquate à celle de l’humanité pendant les vicissitudes de ce siècle ? Ceux donc des membres des assemblées révolutionnaires qui parlaient alors des principes de leur conduite comme s’ils en avaient une science certaine, et se flattaient de posséder toute la vérité politique parce qu’ils combinaient en syllogismes quelques concepts vagues, imitant la prétendue géométrie du Contrat social, ceux-là étaient le jouet d’une illusion d’autant plus funeste qu’ils puisaient dans cette certitude imaginaire le triste courage de se supprimer les uns les autres quand ils ne tiraient pas des mêmes éternels principes les mêmes théorèmes et les mêmes corollaires !
Osons donc dire que dans l’ordre de l’action — à moins peut-être qu’il ne faille adapter les moyens aux fins déjà posées pour l’instant le plus voisin de nous — ce n’est pas de vérité ni d’erreur qu’il s’agit. Il y a là des désirs et des volontés qui s’unissent ou se heurtent, et les dogmes politiques dont on a pendant trop longtemps célébré l’évidence, non seulement sont liés arbitrairement à une métaphysique très discutable — la métaphysique contraire est maintenant invoquée pour légitimer les mêmes conclusions il y a un socialisme matérialiste comme il y a un socialisme chrétien — mais n’ont aucun droit à se présenter comme des connaissances scientifiques, n’étant en somme que des vœux ou des résolutions conformes à