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2<,6 VIE D'ESOPE

les ayant premièrement menés à l'ombre d'un arbre, et illec présenté à manger honnestement, les remit au droict chemin. Eux, bien joyeux, le remer- cièrent, et, levans les mains au ciel, prièrent pour luy. De là vint qu'en dormant, il recouvra la parole, comme au paravant il fust bègue et fort tardif à parler. Peu après, reprenant Zenas, qui estoit com- mis au labourage du champ, Zenas, par faux rapports, le mit en la malle grace de son maistre, qui pour cest effect le luy donna. Zenas après le vendit à un marchand allant par là, lequel marchand, ayant faute de chevaux, fit commandement à ses serviteurs qu'ils portassent chacun leur fardeau, et aussi à Esope. Mais ledit Esope, se disant estre foible et débile, eut le choix et eslite de porter la plus légère charge. A ceste cause, il print un panier plein de pains, lequel sembloit estre le plus gros fardeau, dont les autres serviteurs se prindrent à rire, car, pour vray, c'es- toit la plus pesante charge. Mais eux, allans par les chemins, s'arresterent pour prendre leur refection: ausquels Esope distribua des pains tant qu'ils en voulurent, et par ce moyen se trouva sa charge dimi- nuée tellement qu'il alloit loin devant eux. Et estant parvenu jusques en Ephese, il fut derechef vendu à un nommé Xanthus, lequel l'interrogua d'où il estoit; iceluy Esope respondit: « De chair. » Lors Xanthus dit: « Je ne demande pas cela, mais je te demande où tu fus nay. » Esope respondit: a Au ventre de ma mere. » Xanthus luy répliqua, disant : « Je ne demande pas cela, mais en quel lieu tu fus nay. » Auquel derechef respondit Esope, disant: « Je ne sçay si je suis nay dedans le lict ou dehors. >» Xan-

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