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Dieu. Tandis que l’homme méchant, sot ou frivole mourra tout entier, en ce sens qu’il ne laissera rien dans le résultat général du travail de son espèce, l’homme voué aux bonnes et belles choses participera à l’immortalité de ce qu’il a aimé. Qui vit aujourd’hui autant que le Galiléen obscur qui jeta, il y a dix-huit cents ans, dans le monde le glaive qui nous divise et la parole qui nous unit ? Les œuvres de l’homme de génie et de l’homme de bien échappent seules ainsi à la caducité universelle ; car seules elles comptent dans la somme des choses acquises, et leurs fruits vont grandissant, même quand l’humanité ingrate les oublie. Rien ne se perd : ce qu’a fait de bien le plus inconnu des hommes vertueux compte plus dans la balance éternelle que les plus insolents triomphes de l’erreur et du mal. Quelque forme qu’il donne à ses croyances, quelque symbole qu’il emploie pour revêtir ses affirmations de l’avenir, l’homme juste a ainsi le droit de dire avec le vieux patriarche de