Page:Ernest Renan - Cantique des cantiques, Calmann-Levy, 1884.djvu/89

Cette page a été validée par deux contributeurs.

natives ne renferme une idée de punition ou de récompense. Renfermeraient-elles l’une et l’autre l’idée de vigilance et de bonne garde, de telle sorte qu’il fallût traduire : « Si notre sœur est vertueuse, gardons-la bien ; si elle est faible, gardons-la bien encore ? » Cela ne se peut. En effet, pourquoi, si elle est vertueuse, l’entourer de murs crénelés ? Pourquoi ces circonstances, évidemment capitales dans la pensée du poëte, de cèdre et d’argent ? Est-il naturel d’ailleurs de supposer que les frères de l’héroïne se fassent les gardiens jaloux de sa vertu, quand nous voyons ailleurs (i, 6) qu’ils sont ses ennemis, qu’ils la haïssent, et que loin de la renfermer ils lui font passer sa vie en plein air[1] ? Tout

  1. L’idée de présenter la jeune fille comme orpheline et délaissée domine tout le poëme. Il est souvent question de sa mère, jamais de son père. Je sais que, dans les mœurs amenées par la polygamie orientale, l’enfant a beaucoup plus de liens avec la mère qu’avec le père. Cependant, dans le Ps. xlv, si analogue à notre poëme, c’est la maison de son père que la fiancée abandonne pour venir joindre son futur époux.