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notion de la canonicité dut produire dans l’exégèse. Le Cantique, qui était venu presque inaperçu depuis Esdras jusqu’à l’ère chrétienne, dut paraître un livre scandaleux quand on l’envisagea au point de vue d’une rigoureuse orthodoxie, dont la première prétention était que les livres canoniques ne renfermaient rien que de saint. On crut donc sauver l’honneur du vieux poëme en lui cherchant un sens allégorique. Mais comme ces explications reposaient sur l’arbitraire le plus complet, aucun système ne prit décidément le dessus. De là une forêt d’interprétations, souvent poétiques, parfois insignifiantes, qui se sont produites chez les juifs et chez les chrétiens, avec une exubérance d’imagination qui cause parfois un véritable étonnement[1].

  1. Il importe d’observer, du reste, que ces interprétations n’étaient pas le plus souvent données par ceux qui les imaginaient comme représentant la pensée de l’auteur. Les habitudes de philologie rigoureuse, qui nous portent à chercher uniquement dans un texte ce que l’auteur a voulu dire, n’étaient pas