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Excités les uns par les autres, Barbares et Civilisés travailleront à l’envi à la totale et inévitable décomposition sociale.


XV.   Alors, les hommes perdront tout sang-froid et toute présence d’esprit ; dans leur soudaine panique, ils laisseront à l’abandon propriétés et affaires qui les préoccupent tant aujourd’hui ; ils se boucheront les oreilles, ils fuiront à toutes jambes, dans toutes directions, respirant à peine ; ils auront des éblouissements et des tintements d’oreilles ; ils voudront se retenir les uns aux autres, et s’entraîneront tous ensemble au gouffre béant des vengeances éternelles, et des remords amers. Ce sera un sauve qui peut général. Tout sera saccagé, foulé aux pieds, dévasté comme une vigne après la vendange. Les villes seront moissonnées par les flammes comme par des faux rougies au fourneau de Vulcain ; les éclats des poutres incendiées sillonneront les ténèbres de la voûte des cieux. Sur ce Chaos de misères et de douleurs, du Ciel à la Terre tremblants, la Faim, le Crime, le Désespoir et la Mort voleront lentement, chargés de cadavres !

— Quand une guerre a pour but d’arracher une société ancienne à son gisement séculaire, de confondre tous ses intérêts, d’agiter toutes ses couches, de purifier les sources de la vie, il faut que cette guerre dure, qu’elle dure longtemps. Car les résultats sociaux que les guerres amènent sont proportionnels aux bouleversements qu’elles occasionnent. La Justice, si longtemps délaissée par les hommes, demande aujourd’hui à être chèrement achetée.


XVI.   Du milieu de ce déchaînement de tous les hommes et de toutes les choses, des entrailles profondes de l’anarchie, des abîmes secrets de la corruption, de toutes les veines, de tous les nerfs du corps social blessé à mort,