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XXXII.   Quand un terrain a porté pendant longues années les mêmes cultures, ses sucs s’appauvrissent. Il faut qu’il soit labouré et qu’on lui confie des semences nouvelles qui croîtront là même où les autres ne faisaient que dépérir.

De même, lorsqu’une nation s’est épuisée à développer un ordre social ancien, elle en demande un autre qui s’élève, fécond, sur les débris du passé. C’est alors qu’il faut que les peuples soient retournés par l’épée comme les guérets par la charrue, afin que l’Humanité ne périsse pas.

J’affirme que l’Europe ne peut faire un pas de plus dans la voie civilisée sans mourir de honte et de misère ; — j’affirme que la vague révolutionnaire monte, formidable, affamée, ébranlant chaque jour les bases de quelque institution, secouant de leur torpeur les nations les plus paisibles, faisant passer sur les plus tièdes ardeurs l’écume salée de la misère ; — j’affirme que les questions négatives et affirmatives les plus formidables sont posées maintenant devant les sociétés, et que les sociétés doivent y répondre. J’affirme que déjà le privilège a succombé sous la division, et l’autorité sous le mépris ; — j’affirme enfin que l’individu revendique la possession de lui-même, et que la société réclame une équitable distribution de ses richesses.


XXXIII.   Il faut que l’Europe soit transformée. — Ni les sociétés européennes ne demeureront telles qu’elles sont aujourd’hui : l’immobilisme n’est pas dans la nature. — Ni les sociétés civilisées ne retourneront vers la Barbarie : les sociétés ne rétrogradent pas plus que les hommes. — Ni les sociétés barbares n’adopteront la Civilisation qu’elles ont repoussée jusqu’à présent, et qui n’a servi qu’à les corrompre à leur surface. — Que pourrait-il résulter en effet d’une transformation qui replongerait l’Europe occidentale dans le Patriarchat et égarerait l’Europe