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Le brigadier Frédéric.

qu’aux oreilles, et je ne pus m’empêcher de répondre :

« Ça, c’est vrai ! Contre Jean Merlin, personne n’a rien à dire ; jamais on n’a vu de meilleur garçon ni de plus honnête ; mais je ne peux pourtant pas offrir ma fille aux gens qui me plaisent ; Merlin ne m’a jamais parlé de mariage avec Marie-Rose, ni sa mère Margrédel, ni son oncle Daniel, ni personne. Vous comprenez bien, monsieur l’inspecteur, que je ne dois pas m’avancer jusque-là, ce serait trop fort ! Et puis tout doit se passer dans l’ordre, la demande doit être faite régulièrement. »

Il allait me répondre, mais Mlle Virginie étant entrée pour verser le café, il prit sur la cheminée une boîte, en disant :

« Allumons un cigare, père Frédéric. »

Je voyais qu’il était réjoui ; la servante étant sortie, il s’écria tout joyeux :

« Ah ça ! père Frédéric, est-ce que vous avez besoin qu’on vous dise que Jean Merlin et Marie-Rose s’aiment de tout leur cœur ? Faut-il que l’oncle Daniel vienne vous déclarer la chose en capote noire, avec des boucles aux souliers ? »

Il riait tout haut, et comme je restais surpris