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L’AMI FRITZ.

Plus d’un Prussien riait dans ses longues moustaches, en les voyant passer.

Fritz songeant qu’il allait revoir la petite Sûzel, était dans un état de béatitude inexprimable.

« Toutes les jeunes filles sont à la Madame-Hütte, se disait-il, surtout le premier jour de la fête : Sûzel est là ! »

Cette pensée l’élevait au septième ciel ; il se délectait en lui-même et saluait les gens d’un air attendri. Mais une fois sur la place des Deux-Boucs, quand il vit le drapeau flotter sur la baraque et qu’il reconnut aux dernières notes d’un hopser, le coup d’archet de son ami Iôsef, alors il éprouva l’enivrement de la joie, et, traînant ses camarades, il se mit à crier :

« C’est la troupe de Iôsef !… C’est la troupe de Iôsef !… Maintenant, il faut reconnaître que le Seigneur Dieu nous favorise ! »

Lorsqu’ils arrivèrent à la porte de la Hütte, le hopser finissait, les gens sortaient, le trombone, la clarinette et le fifre s’accordaient pour une autre danse ; la grosse caisse rendait un dernier grondement dans la baraque sonore.

Ils entrèrent, et les estrades tapissées de jeunes filles, de vieux papas, de grand’mères, les guirlandes de chêne, de hêtre et de mousse suspen-