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L’AMI FRITZ.

douze piliers en cœur de chêne, étaient rangés sur deux lignes, et séparés l’un de l’autre par des barrières, soixante chevaux, gris, noirs, bruns, pommelés, la croupe ronde et luisante, la queue nouée en flot, le jarret solide, la tête haute : les uns hennissant et piétinant, les autres tirant le fourrage du râtelier, d’autres se tournant à demi pour voir. La lumière, arrivant du fond par deux hautes fenêtres, éclairait cette écurie de longues traînées d’or. Les grandes ombres des piliers s’allongeaient sur le pavé, propre comme un parquet, sonore comme un roc. Cet ensemble avait quelque chose de vraiment beau, et même de grand.

Les garçons d’écurie étrillaient et bouchonnaient ; un postillon, en petite veste bleue brodée d’argent, son chapeau de toile cirée sur la nuque, conduisait un cheval vers la porte ; il allait sans doute partir en estafette.

Le père Fânen et Fritz passèrent lentement derrière les chevaux.

« Il vous en faut deux, dit le maître de poste, choisissez. »

Kobus, après avoir passé son inspection, choisit deux vigoureux roussins gris pommelés, qui devaient aller comme le vent. Puis il entra dans