Page:Erckmann-Chatrian - L’Ami Fritz.djvu/232

Cette page a été validée par deux contributeurs.
222
L’AMI FRITZ.

Enfin il s’assit au milieu de la jubilation universelle, et fit asseoir le père Christel à sa droite. David alla regarder Frédéric Schoultz, le gros Hâan, Speck et cinq ou six autres qui faisaient une partie de rams, à deux kreutzers la marque.

On se mit à boire de cette fameuse bière de mars, qui vous monte au nez comme le vin de Champagne.

En face, à la brasserie des Deux-Clefs, les hussards de Frédéric Wilhelm buvaient de la bière en cruchons, les bouchons partaient comme des coups de pistolets ; on se saluait d’un côté de la rue à l’autre, car les bourgeois de Hunebourg sont toujours bien avec les militaires, sans frayer pourtant ensemble, ni les recevoir dans leurs familles, chose toujours dangereuse.

À chaque instant le père Christel disait :

« Il est temps que je parte, monsieur Kobus ; faites excuse, je devrais déjà être depuis deux heures à la ferme.

— Bah ! s’écria Fritz en lui posant la main sur l’épaule, ceci n’arrive pas tous les jours, père Christel ; il faut bien de temps en temps s’égayer et se dégourdir l’esprit. Allons, encore une chope !! »

Et le vieil anabaptiste, un peu gris, se rasseyait