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de terrible. Ils ne pouvaient pas la lire, et de temps en temps l’un ou l’autre disait en allemand ou en français :

« Ils ne sont pourtant pas tous morts !… il en reviendra tout de même. »

D’autres criaient :

« Mais on ne voit rien… on ne peut pas approcher ! »

Une pauvre vieille, derrière, levait les mains en criant :

« Christophe… mon pauvre Christophe !… »

D’autres, comme indignés de l’entendre, disaient :

« Faites donc taire cette vieille ! »

Chacun ne pensait qu’à soi.

Derrière, il en venait toujours d’autres par la porte d’Allemagne.

À la fin, Harmentier, le sergent de ville, sortit de la voûte du corps de garde, et se mit au haut des marches, avec une affiche toute pareille à celle du mur ; quelques soldats le suivaient. Alors tout le monde courut de son côté, mais les soldats écartèrent les premiers, et le père Harmentier se mit à lire cette affiche, qu’on appelait le 29e Bulletin, et dans laquelle l’Empereur racontait que, pendant la retraite, les chevaux périssaient toutes les nuits par milliers.-- Il ne disait rien des hommes !