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au village d’Eglaystadt. Le 22, nous bivaquions sur les glacis d’Erfurt, où l’on nous donna des souliers neufs et des effets d’habillement. Cinq ou six compagnies débandées se réunirent à notre bataillon ; c’étaient presque tous des conscrits qui n’avaient plus que le souffle. Nos habits neufs et nos souliers nous allaient comme des guérites ; mais cela ne nous empêchait pas de sentir la bonne chaleur de ces habits : nous croyions revivre. Il fallut repartir le 22, et les jours suivants nous passâmes près de Gotha, de Teitlèbe, d’Eisenach, de Salmunster. Les Cosaques nous observaient du haut de leurs biques ; quelques hussards leur donnaient la chasse, ils se sauvaient comme des voleurs et revenaient aussitôt après. Beaucoup de nos camarades avaient la mauvaise habitude de marauder le soir pendant que nous étions au bivac, ils attrapaient souvent quelque chose ; mais il en manquait toujours à l’appel le lendemain, et les sentinelles eurent la consigne de tirer sur ceux qui s’écartaient. Moi, j’avais les fièvres depuis notre départ de Leipzig ; elles allaient en augmentant et je grelottais jour et nuit. J’étais devenu si faible, que je pouvais à peine me lever le matin pour me