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ventre à terre et le pistolet levé, firent rebrousser la foule à droite et à gauche dans les champs. Ils criaient d’une voix éclatante : « L’Empereur ! l’Empereur ! » Aussitôt le bataillon se rangea, présenta les armes au bas de la chaussée, et, quelques secondes après, les grenadiers à cheval de la garde — de véritables géants, avec leurs grandes bottes, et leurs immenses bonnets à poil qui descendaient jusqu’aux épaules, ne laissant voir que le nez, les yeux et les moustaches —, passèrent au galop, la poignée du sabre serrée sur la hanche. Chacun était content de se dire : « Ceux-là sont avec nous… ce sont de rudes gaillards ! » Â peine avaient-ils défilé, que l’état-major parut… Figurez-vous cent cinquante à deux cents généraux, maréchaux, officiers supérieurs ou d’ordonnance, — montés sur de véritables cerfs, et tellement couverts de broderies d’or et de décorations, qu’on voyait à peine la couleur de leurs uniformes, — les uns grands et maigres, la mine hautaine ; les autres courts, trapus, la face rouge ; d’autres plus jeunes, tout droits sur leurs chevaux comme des statues, avec des yeux luisants et de grands nez en bec d’aigle : c’était quelque chose de magnifique et de terrible ! Mais