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les Prussiens se déployer dans cette direction et s’avancer par milliers sur le champ de bataille. Ils allaient donner la main aux Autrichiens et aux Russes, et fermer le grand cercle autour de nous ; personne maintenant ne pouvait les en empêcher, d’autant plus que Bernadotte et le général russe Beningsen, restés en arrière, arrivaient avec cent vingt mille hommes de troupes fraîches. Ainsi notre armée, après avoir livré trois batailles en un seul jour, et réduite à cent trente mille combattants, allait être prise dans un cercle de trois cent mille baïonnettes, sans compter cinquante mille chevaux et douze cents canons ! De Schoenfeld, le bataillon se remit en marche pour rejoindre la division à Kohlgarten. Sur toute la route, on voyait s’écouler lentement les convois de blessés ; toutes les charrettes du pays avaient été mises en réquisition pour ce service, et, dans les intervalles, marchaient encore des centaines de malheureux, le bras en écharpe, la figure bandée, pâles, abattus, à demi morts. Tout ce qui pouvait se traîner ne montait pas en charrette et tâchait pourtant de gagner un hôpital. Nous avions mille peines à traverser cet encombrement, lorsque tout à coup, en approchant de Kohlgarten, une vingtaine de hussards, arrivant