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fois j’étais venu manger là de bonnes fritures et boire du vin blanc avec Zimmer, au petit bouchon de la Gerbe-d’Or, sous la treille du père Winter, quand le soleil chauffait l’air et que la verdure brillait autour de nous !… Ces temps étaient passés ! On plaça les sentinelles ; quelques hommes entrèrent au village pour chercher du bois et des vivres. Je m’assis contre le mur du cimetière et je m’endormis. Vers trois heures du matin, je fus éveillé. « Joseph, me disait Zébédé, viens donc te chauffer ; si tu restes là, tu risques d’attraper les fièvres. » Je me levai comme ivre de fatigue et de souffrance. Une petite pluie fine tremblotait dans l’air. Mon camarade m’entraîna près du feu, qui fumait sous la pluie. Ce feu n’était que pour la vue, il ne donnait point de chaleur ; mais Zébédé m’ayant fait boire une goutte d’eau-de-vie, je me sentis un peu moins froid et je regardai les feux du bivac qui brillaient de l’autre côté de la Partha. « Les Prussiens se chauffent, me dit Zébédé ; ils sont maintenant dans notre bois. — Oui, lui répondis-je, et le pauvre Klipfel est aussi là-bas ; il n’a plus froid, lui ! » Je claquais des dents. Ces paroles nous rendirent