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qui attaquait l’aile gauche de l’armée prussienne, et qui voulait porter secours au général Marmont à Mockern : là vingt mille Français, postés sur un ravin, arrêtaient les quatre-vingt mille hommes de Blücher ; et du côté de Wachau, cent quinze mille Français livraient bataille à deux cent mille Autrichiens et Russes ; plus de quinze cents pièces de canon tonnaient. Notre pauvre petite fusillade sur la côte de Witterch était comme le bourdonnement d’une abeille au milieu de l’orage. Et même quelquefois nous cessions de tirer de part et d’autre pour écouter… Cela me paraissait quelque chose d’épouvantable et pour ainsi dire de surnaturel ; l’air était plein de fumée de poudre, la terre tremblait sous nos pieds ; les vieux soldats comme Pinto disaient qu’ils n’avaient jamais rien entendu de pareil. Vers six heures, un officier d’état-major remonta sur notre gauche, porter un ordre au colonel Lorain, et presque aussitôt on sonna la retraite. Le bataillon avait perdu soixante hommes, par la charge des hussards prussiens et la fusillade. Il faisait nuit lorsque nous sortîmes de la forêt, et, sur le bord de la Partha, — parmi les caissons, les convois de toute sorte, les corps d’armée en retraite, les détachements, les voitures