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la balle de ce gueux avait tout cassé. Je me sentais tout froid. « Tu viens d’en échapper d’une belle ! » me cria le sergent en se mettant à courir ; et moi qui ne voulais pas rester seul dans un pareil endroit, je le suivis bien vite. Le lieutenant Bretonville, son sabre sous le bras, répétait : « En avant ! en avant !… » Plus loin sur la droite, on tirait toujours. Mais voilà que nous arrivons au bord d’une clairière ou se trouvaient cinq ou six gros troncs de chênes abattus, une petite mare pleine de hautes herbes, et pas un seul arbre pour nous couvrir. Malgré cela, plusieurs s’avançaient hardiment, quand le sergent nous dit : « Halte !… les Prussiens sont, bien sûr, en embuscade aux environs, ouvrons l’œil. » Il avait à peine dit cela, qu’une dizaine de balles sifflaient dans les branches et que les coups retentissaient ; en même temps, un tas de Prussiens allongeaient les jambes et entraient plus loin dans le fourré. « Les voilà partis. En route ! » dit Pinto. Mais le coup de fusil de mon shako m’avait rendu bien attentif, je voyais en quelque sorte à travers les arbres ; et comme le sergent voulait traverser la clairière, je le retins par le bras en