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figures que le jour où les Autrichiens s’étaient déclarés contre nous. Je pensai que nous avions eu des malheurs, ce qui était vrai, comme je l’appris plus tard, car les gazettes de Paris n’en disaient rien. Le temps s’était mis à la pluie à la fin d’août ; l’eau tombait à verse. Je ne sortais plus de la caserne. Souvent, assis sur mon lit — regardant par la fenêtre l’Elster bouillonner sous l’ondée, et les arbres des petites îles se pencher sous les grands coups de vent -, je pensais : « Pauvres soldats !… pauvres camarades !… que faites-vous à cette heure ?… où êtes-vous ? Sur la grande route peut-être, au milieu des champs ! » , Et malgré mon chagrin de vivre là, je me trouvais moins à plaindre qu’eux. Mais un jour le vieux chirurgien Tardieu fit son tour et me dit : « Votre bras est solide,… Voyons, levez-moi cela… Bon… bon ! » Le lendemain, à l’appel, on me fit passer dans une salle où se trouvaient des effets d’habillement, des sacs, des gibernes et des souliers en abondance. Je reçus un fusil, deux paquets de cartouches et une feuille de route pour le 6ème, à Gauernitz, sur l’Elbe. C’était le 1er octobre. Nous nous mîmes en marche douze ou quinze