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son état, puisque les Prussiens avaient tiré d’en bas, par-dessus le mur du jardin, et que la balle avait dû remonter. Il lava lui-même la plaie et remit le bandage en deux tours de main; de sorte que mon épaule ne pouvait plus remuer et que tout se trouvait en ordre. Je me sentais beaucoup mieux. Dix minutes après, un infirmier vint me mettre une chemise sans me faire mal, à force d’habitude. Le chirurgien s’était arrêté près de l’autre lit et disait : « Hé ! te voilà donc encore, l’ancien ! — Oui, monsieur le baron, c’est encore moi, répondit le canonnier, tout fier de voir qu’il le reconnaissait : la première fois, c’était à Austerlitz, pour un coup de mitraille, ensuite à Iéna, ensuite à Smolensk, pour deux coups de lance. — Oui, oui, dit le chirurgien comme attendri; et maintenant qu’est-ce que nous avons ? — Trois coups de sabre sur le bras gauche, en défendant ma pièce contre les hussards prussiens. » Le chirurgien s’approcha, défit le bandage, et je l’entendis qui demandait au canonnier : « Tu as la croix ? — Non, monsieur le baron. —