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passer à cheval, avec le général Souham et cinq ou six autres officiers supérieurs, et malgré la nuit, nous les reconnûmes très bien ; le ciel était tout blanc d’étoiles, la lune montait, on y voyait presque comme en plein jour

Ils s’arrêtèrent dans un coude de la rivière, où l’on plaça six canons, et, presque aussitôt après, les pontonniers arrivèrent avec une longue file de voitures chargées de madriers, de pieux et de tout ce qu’il fallait pour jeter deux ponts. Nos hussards couraient le long de la rive ramasser les bateaux, les canonniers étaient à leurs pièces, pour balayer ceux qui voudraient empêcher l’ouvrage. Longtemps nous regardâmes avancer ce travail. De tous côtés on entendait crier : « Qui vive ! — Qui vive ! » C’étaient les régiments du 3e corps qui arrivaient.

À la pointe du jour, je finis par m’endormir, il fallut que Klipfel me secouât pour m’éveiller. On battait le rappel dans toutes les directions ; les ponts étaient finis ; on allait traverser la Saale.

Il tombait une forte rosée ; chacun se dépêchait d’essuyer son fusil, de rouler sa capote et de la boucler sur son sac. On s’aidait l’un l’autre, on se mettait en rang. Il pouvait être alors quatre heures du matin. Tout était gris à cause du brouillard qui montait de la rivière.