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garde, il fallut repartir en avant, du côté de Sulza et de Warthau. C’est alors que nous vîmes l’ennemi : des Cosaques qui se retiraient toujours hors de portée de fusil, et plus ces gens se retiraient, plus nous prenions de courage.

Ce qui m’ennuyait, c’était d’entendre Zébédé dire d’un air de mauvaise humeur :

« Ils ne s’arrêteront donc jamais ? ils ne s’arrêteront donc jamais ? »

Je pensais : « S’ils s’en vont, qu’est-ce que nous pouvons souhaiter de mieux ? Nous aurons gagné sans avoir eu de mal. »

Mais, à la fin, ils firent halte de l’autre côté d’une rivière assez large et profonde ; et nous en vîmes une quantité qui nous attendaient pour nous hacher, si nous avions le malheur de passer cette rivière.

C’était le 29 avril, il commençait à se faire tard, on ne pouvait voir de plus beau soleil couchant. De l’autre côté de l’eau s’étendait une plaine à perte de vue, et, sur le bandeau rouge du ciel, fourmillaient ces cavaliers, avec des shakos recourbés en avant, des vestes vertes, une petite giberne sous le bras et des pantalons bleu de ciel ; il y avait aussi derrière des quantités de lances ; le sergent Pinto les reconnut pour être des chasseurs russes à cheval et des Cosaques.