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ira bien. Et tant qu’au reste, la discipline empêchera toujours les Hessois, les Bavarois et les Saxons de tourner, comme elle nous force bien de nous battre, nous autres Français, quoique plus d’un n’en ait pas envie. Est-ce que le soldat n’obéit pas au caporal, le caporal au sergent, ainsi de suite jusqu’au maréchal, qui fait ce que le roi veut ? On voit bien que ce pasteur n’a jamais servi dans un régiment, sans cela il saurait que les idées ne sont rien, et que la consigne est tout ; mais je ne veux pas le contredire, le maître de poste ne m’apporterait plus une bouteille de vin après le souper. Qu’ils pensent ce qui leur plaira, tout ce que je souhaite, c’est que nous ne rencontrions que des théologiens. »

Pendant que nous étions à causer ainsi, tout à coup, le 27 mars au matin, l’ordre de partir arriva. Le bataillon alla coucher à Lauterbach, puis le lendemain à New-Kirchen, et nous ne fîmes plus que marcher, marcher toujours. Ceux qui ne s’habituèrent pas alors à porter le sac ne pouvaient pas se plaindre du manque d’exercice ; car, Dieu merci, nous faisions du chemin ! Moi, je ne suais plus depuis longtemps, avec mes cinquante cartouches dans ma giberne, mon sac et mon fusil sur l’épaule, et je ne sais pas si je boitais encore.