Page:Erckmann-Chatrian - Histoire d’un conscrit de 1813.djvu/134

Cette page n’a pas encore été corrigée

Cela vous entre difficilement dans la tête ; mais quelque chose vous aide beaucoup : c’est une espèce de pancarte affichée dans les chambrées, et qu’on vous lit de temps en temps, pour vous ouvrir les idées. Cette pancarte suppose tout ce qu’un soldat peut avoir envie de faire, par exemple de retourner dans son village, de refuser le service, de résister à son chef, etc., et cela finit toujours par la mort ou cinq ans de boulet au moins.

Le lendemain de notre arrivée à Francfort, j’écrivis à M. Goulden, à Catherine et à la tante Grédel ; on peut se figurer avec quel attendrissement. Il me semblait, en leur parlant, être encore au milieu d’eux ; je le leur racontais mes fatigues, le bien qu’on m’avait fait à Mayence, le courage qu’il m’avait fallu pour ne pas rester en arrière. Je leur dis aussi que j’étais toujours en bonne santé, grâce à Dieu ; que je me sentais plus fort qu’avant de partir, et que je les embrassais mille et mille fois

J’écrivais dans notre chambrée, au milieu des camarades, et les Phalsbourgeois me faisaient tous ajouter des compliments pour leurs familles. Enfin, ce fut encore un bon moment

Ensuite j’écrivis à Mayence, aux braves gens de la Capuzigner Strasse, qui m’avaient en quelque sorte sauvé de la désolation. Je leur dis que