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la pluie, dans la neige, dans les marches forcées, tandis que les autres buvaient du bon vin, ils disent : Ce sont des ivrognes ! Et ces conscrits qui ne demandaient pas mieux que de rester chez eux, de travailler, deviennent des espèces de mendiants. Voilà ce que je pense, Zébédé ; je ne trouve pas cela tout à fait juste, et j’aimerais mieux voir les amis de la gloire aller se battre eux-mêmes et nous laisser tranquilles. »

Alors il me disait :

« Je pense la même chose que toi ; mais, puisque nous sommes pincés, il vaut mieux dire que nous combattons pour la gloire. Il faut toujours soutenir son état et tâcher de faire croire aux gens qu’on est bien ; sans cela, Joseph, on serait encore capable de se moquer de nous. »

En raisonnant de ces choses et de beaucoup d’autres, nous finîmes par découvrir une grande rivière, que le sergent nous dit être le Mein, et, près de cette rivière, un village sur la route. Nous ne savions pas le nom de ce village, mais c’est là que nous fîmes halte.

On entra dans les maisons, et chacun put s’acheter de l’eau-de-vie, du vin et de la viande.

Ceux qui n’avaient pas d’argent cassèrent leur croûte de pain bis en regardant les autres.