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— Merci », répondait le conscrit.

Et l’on partait.

Oui… oui… bon voyage ! On ne te reverra plus, pauvre diable… Combien d’autres ont suivi le même chemin !

Je n’oublierai jamais qu’à Kaiserslautern, le deuxième jour de notre départ, ayant débouclé mon sac pour mettre une chemise blanche, je découvris, sous les chemises, un petit paquet assez lourd, et que, l’ayant ouvert, j’y trouvai cinquante-quatre francs en pièces de six livres, et sur le papier ces mots de M. Goulden : « Sois toujours bon, honnête, à la « guerre. Songe à tes parents, à tous ceux pour lesquels tu donnerais ta vie « et traite humainement les étrangers, afin qu’ils agissent de même à l’égard « des nôtres. Et que le Ciel te conduise… qu’il te sauve des périls ! Voici « quelque argent, Joseph. Il est bon, loin des siens, d avoir toujours un peu « d’argent. Écris-nous le plus souvent que tu pourras. Je t’embrasse, mon « enfant, je te serre sur mon cœur. »

En lisant cela, je répandis des larmes, et je pensai : « Tu n’es pas entièrement abandonné sur la terre… De braves gens songent à toi ! Tu n’oublieras jamais leurs bons conseils. »

Enfin, le cinquième jour, vers dix heures du soir, nous entrâmes à Mayence. Tant que je vivrai,