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vers elle, elle me prit la tête entre ses mains, et, m’embrassant, elle criait :

« Je t’ai toujours aimé, Joseph, depuis que tu n’étais qu’un enfant… je t’ai toujours aimé ! tu ne nous as donné que de la satisfaction, et maintenant il faut que tu partes… Mon Dieu, mon Dieu, quel malheur ! »

Moi, je ne pleurais plus.

Quand la tante Grédel m’eut lâché, je regardai Catherine, qui ne bougeait pas, et, m’étant approché, je la baisai sur le cou. Elle ne se leva point, et je m’en allai bien vite, n’ayant plus de force, lorsqu’elle se mit à crier d’une voix déchirante :

« Joseph !… Joseph ! »

Alors je me retournai ; nous nous jetâmes dans les bras l’un de l’autre, et, quelques instants encore, nous restâmes ainsi, sanglotant. Catherine ne pouvait plus se tenir ; je la posai dans le fauteuil et je partis sans oser tourner la tête.

J’étais déjà sur la place, au milieu des Italiens et d’une foule de gens qui criaient et pleuraient en reconduisant leurs garçons, et je ne voyais rien, je n’entendais rien.

Quand le roulement recommença, je regardai et je vis que j’étais entre Klipfel et Furst, tous deux le sac au dos ; leurs parents devant nous,