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L’AMI FRITZ.


La propriété de l’ami Fritz. (Page 19.)


trois ans, bien entendu, car maintenant elle n’est pas encore assez forte pour les grands travaux ; mais ce sera une vraie femme de ménage ; elle a reçu le don du Seigneur, elle fait ces choses avec plaisir. « Quand on est forcé de porter son chien à la chasse, disait le vieux garde Frœlig, cela va mal ; les vrais chiens de chasse y vont tout seuls, on n’a pas besoin de leur dire : «  Ça, c’est un moineau, ça une caille ou une perdrix ; » ils ne tombent jamais en arrêt devant une motte de terre comme devant un lièvre. » Mopsel, lui, ne ferait pas la différence. Mais quant à Sûzel, j’ose dire qu’elle est née pour tout ce qui regarde la maison.

— C’est positif, dit Fritz. Mais le don de la cuisine, voyez-vous, est une véritable bénédiction. On peut rouir le chanvre, filer, laver, tout ce que vous voudrez, avec des bras, des jambes et de la bonne volonté ; mais distinguer une sauce d’une autre, et savoir les appliquer à propos, voilà quelque chose de rare. Aussi j’estime plus ces beignets que tout le reste ; et pour les faire aussi bons, je soutiens qu’il faut mille fois plus de talent que pour filer et blanchir cinquante aunes de toile.

— C’est possible, monsieur Kobus ; vous êtes plus fort sur ces articles que moi.

— Oui, Christel, et je suis si content de ces beignets, que je voudrais savoir comment elle s’y est prise pour les faire.

— Eh ! nous n’avons qu’à l’appeler, dit le vieux fermier, elle nous expliquera cela. — Sùzel ! Sùzel ! »

Sûzel était justement en train de battre le