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L’AMI FRITZ.

ouvertes sur la vallée, laissaient entrer par bouffées les âpres parfums des bois.

En ce moment le père Christel arrivait déjà quelquefois de la côte, la blouse trempée de rosée et les souliers chargés de glèbe jaune.

« Eh bien, monsieur Kobus, s’écriait le brave homme, comment ça va-t-il ce matin ?

— Mais, très-bien, père Christel ; je me plais de plus en plus ici, je suis comme un coq en pâte, votre petite Sûzel ne me laisse manquer de rien. »

Si Sûzel se trouvait là, aussitôt elle rougissait et se sauvait bien vite, et le vieil anabaptiste disait :

« Vous faites trop d’éloges à cette enfant, monsieur Kobus ; vous la rendrez orgueilleuse d’elle-même.

— Bah ! bah ! il faut bien l’encourager, que diable ; c’est tout à fait une bonne petite femme de ménage ; elle fera la satisfaction de vos vieux jours, père Christel.

— Dieu le veuille, monsieur Kobus, Dieu le veuille, pour son bonheur et pour le nôtre ! »

Ils déjeunaient alors ensemble, puis allaient voir les travaux, qui marchaient très-bien et prenaient une belle tournure. Après cela, le fermier retournait aux champs, et Fritz rentrait fumer une bonne pipe dans sa chambre, les deux coudes au bord de sa fenêtre, sous le toit, regardant travail-