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L’AMI FRITZ.

Il ouvrit la porte en criant dans l’allée :

« Katel, est-ce que la mère Orchel est là ?

— Non, monsieur David. »

Alors il referma.

Fritz semblait un peu remis de sa désolation.

« David, fit-il, tu me rends la vie.

— Allons, schaude, dit le vieux rebbe, lève-toi, remets tes souliers et laisse-moi faire. Nous allons ensemble là-bas, demander Sûzel en mariage. Mais peux-tu te tenir sur tes jambes ?

— Ah ! pour aller demander Sûzel, s’écria Fritz, je marcherais jusqu’au bout du monde !

— Hé ! hé ! hé ! fit le vieux Sichel, dont tous les traits se contractèrent, et dont les petits yeux se plissaient, hé ! hé ! hé ! quelle peur tu m’as faite !… J’ai pourtant traversé la ville comme cela ; c’est encore bien heureux que je n’aie pas oublié de mettre ma culotte. »

Il riait en boutonnant son gilet de finette et sa grosse capote verte. Mais Fritz n’osait pas encore rire, il remettait ses souliers, tout pâle d’inquiétude ; puis il se coiffa de son feutre et prit son bâton, en disant d’une voix émue :

« Maintenant, David, je suis prêt ; que le Seigneur nous soit en aide !

Amen ! » répondit le vieux rebbe.

Ils sortirent.