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L’AMI FRITZ.

Ils causaient ainsi depuis vingt minutes, et Fritz, voyant l’heure approcher à la pendule, prêtait de temps en temps l’oreille. Tout à coup il dit :

« Voici la voiture ! »

Les deux autres écoutèrent, et n’entendirent, au bout de quelques secondes, qu’un roulement lointain, accompagné de grands coups de fouet.

« Ce n’est pas cela, dit Hâan ; c’est une voiture de poste qui roule sur la grande route. »

Mais le roulement se rapprochait, et Kobus souriait. Enfin la voiture déboucha dans la rue, et les coups de fouet retentirent comme des pétards sur la place des Acacias, avec le piétinement des chevaux et le frémissement du pavé.

Alors tous trois se levèrent, et, se penchant à la fenêtre, ils virent la berline que Fritz avait louée, s’approchant au trot, et le vieux postillon Zimmer, avec sa grosse perruque de chanvre tressée autour des oreilles, son gilet blanc, sa veste brodée d’argent, sa culotte dé daim et ses grosses bottes remontant au-dessus des genoux, qui regardait en l’air en claquant du fouet à tour de bras.

« En route ! » s’écria Kobus.

Il se coiffa de son feutre, tandis que les deux autres se regardaient ébahis ; ils ne pouvaient croire que la berline fût pour eux, et seulement