Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/248

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
235
L’AMI FRITZ.

— Bon ! s’écria Schoultz, la partie était en train ; j’en ai quinze, on te les donne ! Cela te convient-il ?

— Soit, dit Kobus, en ôtant sa capote et ramassant une boule ; je suis curieux de savoir si je n’ai pas oublié depuis l’année dernière.

— Père Baumgarten ! criait le professeur Speck, père Baumgarten ! »

L’aubergiste parut.

« Apportez un verre pour M. Kobus, et une autre bouteille. Est-ce que la friture avance ?

— Oui, monsieur Speck.

— Vous la ferez plus forte, puisque nous sommes un de plus. »

Baumgarten, le dos courbé comme un furet, rentra chez lui en trottinant ; et dans le même instant Fritz lançait sa boule avec tant de force, qu’elle tombait comme une bombe de l’autre côté du jeu, dans le verger de la poste aux chevaux.

Je vous laisse à penser la joie des autres ; ils se balançaient sur leurs bancs, les jambes en l’air, et riaient tellement, que Hâan dut ouvrir plusieurs boutons de sa culotte pour ne pas étouffer.

Enfin, la friture arriva, une magnifique friture de goujons tout croustillants et scintillants de graisse, comme la rosée matinale sur l’herbe, et répandant une odeur délicieuse.