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L’AMI FRITZ.

Et comme Sûzel alors levait sur lui ses grands yeux troublés, il ajouta :

« Oui, nous avons fait de la musique… ce sont de vieux airs… ça ne vaut pas le diable !… Enfin, enfin, j’ai fait comme j’ai pu… On ne saurait tirer une bonne mouture d’un mauvais sac. »

Sûzel avait repris son panier et s’en allait avec Katel, disant : « Bonjour, monsieur Kobus ! » d’une voix si douce, qu’il ne sut que répondre, et resta plus d’une minute comme enraciné au milieu de la salle, regardant vers la porte, tout effaré ; puis il se prit à dire :

« Voilà de belles affaires, Kobus ! tu viens de te distinguer sur cette maudite patraque… Oui… oui… c’est du beau… tu peux t’en vanter… ça te va bien à ton âge. Que le diable soit de la musique ! S’il m’arrive encore de jouer seulement Père capucin, je veux qu’on me torde le cou ! »

Alors il prit sa canne et son chapeau sans attendre le déjeuné, et sortit faire un tour sur les remparts, pour réfléchir à son aise sur les choses surprenantes qui venaient de s’accomplir.