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Histoire d’un paysan.

« Oui, oui, c’est encore plus terrible que les massacres de Septembre. (Page 250.)
« Oui, oui, c’est encore plus terrible que les massacres de Septembre. (Page 250.)

Ceux qu’on appelait gens du Marais, à trois ou quatre cents, remplissaient le milieu de l’assemblée ; c’étaient presque tous de bons républicains, mais les gazettes innombrables dé la Gironde qui ne cessaient d’exciter la jalousie des départements contre Paris, leur avaient représenté les Parisiens comme des brigands et les montagnards comme des chefs de bandits. Il faut dire aussi que les massacres de septembre les avaient épouvantés ; c’était bien naturel ! Ces gens avaient donc peur ; et, tout en se méfiant des girondins, parce qu’ils en reconnaissaient un bon nombre pour être d’anciens royalistes, ils votaient pourtant avec eux dans la crainte des montagnards.

On pense bien qu’avec des idées pareilles la

Montagne et la Gironde ne pouvaient pas s’entendre ; d’autant plus qu’en ce temps ces choses n’étaient pas claires comme je vous les raconte ; les plus malins eux-mêmes s’y trompaient ; à force d’avoir été trahis, on ne voyait partout que des traîtres. Aussi les disputes recommençaient chaque jour, tantôt sur un chapitre, tantôt sur un autre. Les girondins accusaient les montagnards d’avoir fait les massacres de septembre, de viser à la dictature et de pousser la révolution dans les excès, pour en dégoûter la nation et mettre Philippe-Égalité sur le trône ; les montagnards accusaient les girondins de vouloir diviser la France en une masse de petites républiques, de préparer la guerre civile en excitant la province contre Paris, et de conspirer avec les royalistes pour rétablir

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