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de nous, n’en pouvant plus, trépassa. Nous n’étions plus que deux. Nous continuâmes. Le lendemain, vers quatre heures de l’après-midi, mon compagnon, ne pouvant plus marcher, se laissa choir en pleurant et expira. Je lui trouvai dans la poche huit pesos et poursuivis mon chemin, à l’aventure, chargé de l’arquebuse et du morceau de viande sèche qui me restait. On voit mon affliction. J’étais lasse, sans chaussures, les pieds ensanglantés. Je m’appuyai contre un arbre, je pleurai (je pense que ce fut la première fois), et je dis le rosaire, me recommandant à la Très-Sainte Vierge et au glorieux Saint Joseph, son époux. Je me reposai un peu et, me relevant, me remis en marche. Il me sembla reconnaître à l’air plus tiède que j’étais sortie du royaume de Chili et entrée dans celui de Tucaman.

Je marchai encore. Le lendemain j’étais à terre, harassée de fatigue et de faim,