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Marseillaise. Une dame proteste parce que quelques personnes, avant que n’éclatassent ces accents imprévus, s’étaient dirigées vers la porte. Elle déclare « qu’on ne doit pas bouger pendant la Marseillaise ». Dans quelle église, au cours de quelle cérémonie rituelle, interdirait-on à quelques fidèles de s’éclipser ? En vérité, un néo-fanatisme règne, plus farouche que ceux dont l’histoire a gardé le souvenir.

— Un journal paraît, qui s’intitule le Rhin français, organe de la Ligue panceltique. Journal et Ligue ont leur siège social rue Édouard-VII, à un pas du Boulevard, où leurs titres s’étalent en lettres énormes. Il suffirait qu’un neutre envoyât la photographie de cette devanture en Allemagne pour qu’on en fît état là-bas, et qu’on dénonçât ainsi les ambitions françaises. Ah ! Maudits soient pangermanistes et panceltiques, et tous les panchosistes qui prolongent la démence et la tuerie !

— Le 24. L’historien Aulard publie dans l’Information un article d’un ton nouveau. C’est la première fois que la presse à grand tirage donne une telle note, et que la Censure la tolère. Il faut en citer des passages :

« L’essentiel, surtout pour la France, qui a déjà fait beaucoup plus de sacrifices que les autres Alliés, c’est que la guerre ne dure pas trop longtemps.

« La paix — non allemande, mais humaine — que nous voulons, ne sera féconde, n’aura les caractères réparateurs de la paix, que si elle ne tarde pas, que si elle intervient avant un trop grand affaiblissement de cette France dont il importe au monde, pour l’équilibre futur, que la force reste entière. Il ne faut pas, dans la grande paix qui se prépare, que la France des Droits de l’Homme ait figure de convalescente anémiée, mais de vigoureuse ouvrière du droit nouveau ».