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dit qu’on fête le poilu, qu’on l’apothéose. Allons donc ! Qu’il se présente, fripé, vacillant, en quelque hôtel cossu, on l’évincera !

— Je ne puis entendre sans une révolte de tout l’être des patriotes exalter « une journée intéressante, où nous n’avons eu que 2.000 morts, et où nous en avons fait 15.000 ».

— Le 7. Proclamation des deux Empereurs à leurs troupes, annonçant la guerre à outrance, après le rejet de leurs offres par l’ennemi. Cri fatal.

— Au cinéma, rue de la Gaîté. Silence opaque quand on projette la bedaine de Joffre, à l’occasion de son maréchalat. Seule dans toute la soirée déchaînera des applaudissements, nourris et sans fin, la simple projection d’une sorte de préface à un film un peu féministe : « Le mari doit plaire à la femme autant que la femme au mari. Ce qui est bon pour l’un est bon pour l’autre. » Les problèmes d’après-guerre passionnent déjà plus que la guerre.

— Un jeune officier du « chiffre » à la Guerre, traducteur de journaux allemands, s’indigne tout bas de n’avoir à faire état que de feuilles pangermanistes et d’être obligé de laisser de côté toute une majorité de journaux plus raisonnables, dont on ne veut pas donner d’extraits. Toujours cette vérité sophistiquée qu’on verse à la foule pour la maintenir en haine, en crainte et en fureur.

— On me raconte que la note allemande sur la paix du 12 décembre parvint à Paris à 2 heures après-midi. On décida d’abord de l’étouffer. Mais on se sentit impuissant à en empêcher la publication et elle fut autorisée à une heure du matin. Les articles d’accueil furent donc improvisés en un court espace de temps.

— Aux Inventions, le capitaine R… nous dit que les ressorts des chargeurs pour nos fusils mitrail-